6 et 12 mois de prison avec sursis requis contre 3 CRS accusés de violences et faux en écriture

22 juin 2021 à 18h45 par Jérôme Noël

"Quelle honte ! Quelle honte pour la police !”. C'est par ces mots que la Procureure s'est adressée aux 3 CRS accusés de violences et de faux en écriture, survenus à l'été 2018 il y a 3 ans, à Calais.


Nous sommes le 31 juillet 2018, 9h30, à Calais. Ce matin-là, une compagnie de CRS intervient près de la station Total pour éloigner des migrants installés sous le pont de la rocade Est. Une intervention marquée par l'interpellation d'un bénévole associatif britannique, accusé d'avoir insulté et poussé un policier au sol. C'est en tout cas ce qu'expliquent trois CRS dans le procès verbal rédigé ce jour-là. Problème: tout est faux.


Le ressortissant britannique, coincé au Royaume-Uni à cause du covid, n'est pas venu donner sa version des faits au tribunal de Boulogne, ce mardi. Finalement, sa présence n’était pas nécessaire, car le tribunal a diffusé des vidéos de la scène, filmée par d'autres bénévoles. On y voit le brigadier-chef donner des coups de pied à des bénévoles pour les faire reculer. Quelques secondes plus tard, il pousse un individu, qui passe par dessus la rambarde de sécurité, tombe par terre et manque de se faire écraser par un camion. Des images indiscutables, et pourtant discutées. Face au tribunal, le CRS maintient sa version et plaide "un réflexe de défense" après avoir été agrippé. "Non, ça ne s'est pas passé comme ça, l'interrompt la Procureure de la République. Sur les images, on voit bien que le bénévole filme avec le téléphone dans une main, et que son autre bras est le long du corps. Pourquoi dites-vous qu'il vous a touché ? Pourquoi dites-vous qu'il vous a entraîné au sol ?" . A la barre, l'homme répond: "Parce que c'était mon ressenti ce jour-là".


Une phrase qui fait bondir l'avocate de la victime. "Si nous n'avions pas les vidéos, mon client aurait été condamné à cause de vos déclarations". Elle s'adresse au brigadier-chef, mais aussi à deux de ses collègues, accusés d'avoir rédigé un faux procès verbal pour soutenir la version de leur supérieur. L'un d'eux admet qu'il a "sûrement été négligent". L'autre avoue qu'il a témoigné sur la base de ce que lui a raconté son chef. "J'ai peut-être été influencé. Pour moi, ça ne pouvait pas être des mensonges. Mais après avoir vu les vidéos, c'est indéniable".


La Procureure de la République requiert 6 mois de prison avec sursis et l'interdiction d'exercer leurs fonctions pendant une durée d'un an à l'encontre des deux fonctionnaires accusés de faux en écriture. Le Parquet réclame 12 mois de prison avec sursis et 5 ans d'interdiction d'exercer ses fonctions.


Des réquisitions disproportionnés selon l'avocat "Il n'y a pas de mort, il n'y a pas de sévices. Il faut remettre l'église au milieu du village. Ce que vous avez à juger, ce sont des faits qui durent 4 secondes: des violences qui n'ont pas engendré d'ITT, et un procès verbal d'une page"


Les trois fonctionnaires ont également été convoqués par l'IGPN. Estimant les violences caractérisées, l'inspection générale de la police nationale a proposé au Ministère de l'Intérieur de sanctionner le brigadier-chef d'une éviction d'une semaine.